Quand les C-level se mettent au freelancing : les raisons d'un succès
L’accès à un poste à forte responsabilité signifie-t-il nécessairement l’arrêt de l’aventure entrepreneuriale ? Certains C-level nous prouvent le contraire.
Dans une optique de “mentoring”, ces profils hautement qualifiés n’hésitent aujourd’hui plus à prendre la casquette de freelance le temps d’une ou de plusieurs missions, à côté de leur emploi salarié.
Pourquoi ce choix ? Quel est le type de mission proposé ? Et quels intérêts pour leur employeur ? C’est ce que nous allons voir dans cet article.
Une remise en question du manager traditionnel
L’image du top manager qui se donne corps et âme à son entreprise a définitivement du plomb dans l’aile.
Fortement remis en question ces dernières années, le rôle de manager est en pleine évolution. Attention accrue sur la capacité d’écoute, remise en cause du système top-down, essor du “manager - coach”... Mais cela ne s’arrête pas là. De plus en plus de managers souhaitent sortir de leur routine et proposer leurs services en freelance, en plus de leur job principal en CDI.
Loin d’être une décision anodine dans un quotidien déjà bien rempli, le déclic se fait souvent à la suite de plusieurs sollicitations. C’est notamment le cas de Jérémy Goillot, ex-Head of Growth chez Spendesk et Fondateur de Growth.Talent qui a effectué plusieurs missions en freelance : “J’ai commencé à recevoir plusieurs propositions par mois, cela a été l’élément déclencheur”.
Ces freelances pas comme les autres sont généralement contactés pour des missions de mentoring et de conseil. A la lumière de leur retour d’expérience, le ou la C-level freelance accompagne sur un temps plus ou moins long une équipe de direction et / ou d’autres C-level sur des enjeux de recrutement, d’organisation de roadmap, de positionnement stratégique…
“Je proposais des missions de conseil sur la structuration d’équipes produit. J’aidais des product managers d’entreprises en forte croissance à s’organiser, à mettre en place des squads, à prioriser les sujets…” -Johan Aradan, ex-VP Product de Malt et CEO de Matcha.
"Quand j’étais en poste chez Spendesk, je faisais uniquement de l’advisory. J’ai accompagné des profils Growth junior ainsi que des Head of Growth pendant plusieurs mois pour la structuration de leurs équipes, la définition de leur roadmap… Je les ai aidés à gérer des problématiques que j’ai moi-même pu rencontrer dans mon job chez Spendesk.”
Jérémy Goillot qui propose aujourd’hui ses services comme membre du collectif Growth Team, à l’instar d’autres équipes de freelances chez Collective qui comptent de nombreux C-Level encore en activité, ou qui viennent de se lancer en indépendant.
Un impact fort pour les clients et les C-level freelances
Les C-level freelances font de leur expérience un vrai plus pour l’entreprise cliente. Internationalisation, phase de scaling, levée de fonds… Des connaissances et expériences qui font la différence pour des entreprises qui cherchent à être rapidement efficaces.
Cette connaissance du terrain leur donne une légitimité plus forte et un regard plus pragmatique qu’une agence ou un cabinet de conseils qui maîtrise moins cet aspect.
Faire appel à un profil de C-level freelance représente également un réel avantage au niveau du prix. Même si le tarif à la journée d’un C-level freelance peut s’avérer élevé, l’entreprise économise in fine par rapport à une collaboration avec une agence ou un cabinet externalisé car elle ne multiplie pas les interlocuteurs inutilement. Cette configuration de collaboration rend les échanges plus fluides et les résultats plus rapidement visibles.
De leur côté, au-delà d’aider les entreprises à atteindre leurs objectifs, les C-level freelances tirent également de nombreux avantages de ces collaborations. Le freelancing peut leur permettre de prendre du recul et de découvrir de nouvelles solutions applicables dans leur job principal. Johan Aradan affirme : “Travailler avec des product managers et des tech qui n’étaient pas dans ma boîte m’a donné l’occasion de faire des sortes de bilans. Cela me permettait de voir les choses que nous faisons bien dans mon ancienne entreprise et de prendre confiance, mais aussi de mettre en lumière des erreurs que nous avons pu commettre.”
Jérémy Goillot parle aussi de ce boost de confiance au niveau personnel : “C’est une expérience qui peut rassurer et permettre de se rendre compte de son expérience. Et on comprend que des entreprises sont prêtes à payer cher pour l’avoir !”
Souvent sursollicité dans leur travail quotidien, le freelancing peut permettre au C-level de revenir à son coeur de métier et de prendre du recul : “Cela faisait longtemps que j’étais à mon poste, je ressentais le besoin de découvrir d’autres environnements, tout en restant dans mon domaine d’activité - le product management. C’était une façon très intéressante de s’aérer l’esprit. L’aspect financier n’était pas négligeable mais ce n’était pas du tout le but premier”, indique Johan Aradan.
Un atout pour la marque employeur
Maintenant que l’on comprend bien les avantages pour les clients et les C-level, qu’en est-il de leur maison mère ? N’ont-elles pas peur de voir leurs collaborateurs leur filer entre les doigts ?
“Pas du tout !”, répond Mathilde Callède, VP People & Culture chez Shine. La néobanque dédiée aux indépendants accorde un jour par mois à ses collaborateurs pour faire du freelancing ou du bénévolat, C-level compris. Une mesure qui leur permet d’attirer des candidats mais aussi (et surtout) d’engager plus fortement les collaborateurs déjà présents.
“L’un des principaux challenges d'une entreprise est de réussir à garder ses talents. Nous voulons simplement les rendre heureux et heureuses afin qu'ils/elles restent dans notre entreprise. Leur montrer notre confiance et leur proposer d'explorer d'autres horizons nous semble être une bonne option pour cela !”- Mathilde Callède, VP People & Culture chez Shine
Bilan ? Pas de chaise musicale chez les top managers Shine : “Au niveau du Comex, sur une équipe de 8 personnes, nous n'avons eu aucun départ. L’ancienneté de ces personnes se situe entre 1 an et 5 ans”. Un turn-over très faible qu’on retrouve aussi à l’échelle de toute l’entreprise : “En 5 ans, sur l’ensemble de notre effectif, nous avons eu une quinzaine de départs volontaires sur une masse actuelle de 170 personnes”, précise Mathilde Callède.
En plus de rendre les collaborateurs plus fidèles à l’entreprise, cette pratique peut les transformer selon Mathilde Callèbe : “Même exploré ponctuellement, nous pensons que le freelancing permet de s'enrichir sur le plan pro et perso, de développer d'autres compétences, de surmonter le syndrome de l'imposteur et de prendre confiance en soi”.
Quelques précautions à avoir en tête
Même si cette pratique peut devenir l’un des piliers de la marque employeur d’une entreprise, elle ne suffit pas en elle-même pour être vraiment efficace et garder ses C-level motivés. “Il faut avoir en tête que ce n’est pas une mesure isolée et qu’elle s’inscrit dans une logique plus large basée sur un équilibre vie pro - perso qui nous tient particulièrement à cœur”, explique Marine Bryszkowski, Head of Coms chez Shine.
Aussi, pour éviter les problèmes de concurrence, ce type de mesure doit s’accompagner d’un léger ajustement légal au sein de l’entreprise. “Nous avons mis en place une clause de confidentialité ainsi qu'une clause de loyauté dans tous nos contrats”, explique Mathilde Callède.
Des dispositions qui font la différence pour des entreprises évoluant dans un secteur très compétitif où une fuite des cerveaux pourrait avoir des conséquences économiques importantes. Autonomie et confiance ne veulent pas dire absence de cadrage !
Bon à savoir : Shine met à disposition ses modèles de contrats pour faciliter la tâche des entreprises qui souhaitent se lancer. Retrouvez ici le modèle de contrat au forfait jours et ici le modèle de contrat aux 35 heures.
Les entreprises et C-level qui font le choix de ce type de collaboration sont la preuve que les ponts entre salariat et freelancing seront de plus en plus fréquents. De quoi imaginer la fin des étiquettes “salarié” ou “freelance” d’ici quelques années ?