Comment obtenir du feedback quand on est freelance ?
Lorsque l’on est travailleur indépendant, on se retrouve la plupart du temps seul face à sa copie. Le hic, c’est que cette solitude se poursuit à l’issue de la prestation : de nombreux freelances ne reçoivent jamais de feedbacks de la part de leurs clients. Ou alors, ce feedback pourra prendre l’apparence d’un retour de flamme : le freelance n’entendra plus jamais parler de son client !
De l’autre côté, les freelances ont aussi leur part de responsabilité : certains formulent mal leur demande de feedback, quand d’autres n’y pensent tout simplement pas, et ce, malgré tous les bénéfices que ce retour pourrait leur apporter.
Alors comment obtenir du feedback lorsqu’on est freelance ? Yéza Lucas, coach professionnelle spécialisée dans l'auto entreprenariat, et Leila Haddouche, social media manager en freelance et co-créatrice du collectif Lookoom, nous dévoilent leurs conseils pour y parvenir.
Le feedback, un incontournable de la vie de freelance
En France, la transparence est l’un des piliers de l’épanouissement au travail. Et de fait, 81% des Français ont besoin de savoir ce qu’ils font de bien dans leur profession mais aussi ce qu’il faudrait améliorer selon le premier baromètre sur le feedback publié par le cabinet de management MoreHuman Partners en 2019.
Mais si l’on est habitué à recevoir des feedbacks de la part de son boss, dans le cadre d’un entretien annuel ou à la machine à café, le processus n’est pas si anodin lorsqu’il se produit entre un freelance et son client. « En effet, il s’agit même d’un problème récurrent puisque bon nombre d’entre eux n'osent pas formuler la demande une fois la mission terminée, par peur de déranger ou bien de se confronter à des avis négatifs sur le travail effectué », reconnaît Yéza Lucas.
Pourtant, la relation ne se joue pas entre un salarié et son patron (ni entre un enfant et son parent !), mais bel et bien entre deux collaborateurs sur un pied d’égalité. « Bien souvent, les freelances ont tendance à l’oublier et se sentent moins libres d’agir comme ils l'entendent, regrette la coach. Mais en tant qu’indépendant, vous n'êtes pas un salarié qui risque de se faire sermonner par son patron ». Ici, le client vous paye car il a besoin d’un service que vous pouvez lui apporter. Vous avez donc toute la légitimité de demander un retour sur le travail que vous avez effectué.
Les feedbacks sont d’autant plus importants qu’il s’agit là d‘une étape essentielle dans l‘activité d’un travailleur indépendant. « D’abord d'un point de vue personnel, dans la mesure où les retours d’un client empêchent le freelance de stagner et lui permettent d’évoluer, de perfectionner son approche et de développer son activité, explique Leila Haddouche. Mais aussi d’un point de vue plus stratégique. »
Car lorsque les feedbacks sont rendus publics par les clients via internet, ils accroissent la notoriété du freelance, sa visibilité sur les réseaux sociaux et lui permettent ainsi d’attirer de nouveaux clients par la suite. Soit que du bonus. « Certes l’exercice n’est pas facile et exige vulnérabilité et remise en question, mais c’est justement cette transparence dans la confrontation qui va vous faire avancer », affirme Yéza Lucas. Alors pour vous sentir challengé, inspirer confiance et exercer votre activité en toute sérénité, donnez vous les moyens de réussir !
8 conseils pour obtenir davantage de feedback
Si les feedbacks sont parties prenantes de la vie de freelance, ils ne sont pour autant pas évidents à obtenir, surtout lorsqu’on ne sait pas par où commencer. Pas de panique, nos expertes nous présentent les huit étapes nécessaires au passage à l’acte. Tour d’horizon des solutions.
1. Oser faire le premier pas
La première étape ici va être d’oser formuler la demande, car c’est trop souvent la peur de déranger le client qui prédomine. Comme si ce dernier pouvait vous envoyer balader dès lors que la mission touche à sa fin. « Pourtant, vous êtes tout à fait en droit de poser cette question dans la mesure où vous avez fourni à votre client un service dont il avait besoin”, affirme Yéza Lucas.
« D’ailleurs, il n’est pas rare que ce dernier oublie tout simplement de donner son avis » renchérit-elle. De la même manière que l’on ne dégaine pas spontanément son téléphone pour noter un restaurant dès que l’on sort dîner (quoi que, ça dépend pour qui) Et si le client n’a ni le temps ni l’envie, son silence radio risque de vous le faire comprendre assez vite.
2. Être honnête avec soi-même
Avant de demander au client son avis sur le déroulé de votre prestation, faites une micro introspection en rembobinant le fil de la mission dans votre tête. « Êtes-vous satisfait du travail que vous avez accompli ? Auriez-vous pu mieux faire ? », interroge la coach.
Posez-vous ces questions en amont pour anticiper le retour du client et ainsi préparer votre réaction, de manière à éviter toute crise de panique si jamais certains retours comportent des aspects négatifs. « N’oubliez pas qu’être jugé fait partie du job et il faut l’accepter », rappelle Yéza Lucas.
3. Demander des points réguliers
De toutes les appréhensions, la peur de se confronter à un feedback négatif est celle qui bloque le plus. « Alors pour éviter un client mécontent une fois la prestation accomplie, il peut être judicieux d’instaurer avec lui des points réguliers pendant toute la durée de l’accompagnement », recommande Yéza Lucas. Et ainsi s’abstenir d’un malaise au moment de se quitter.
Pour cela, proposez-lui dès le début de la mission de vous entretenir ponctuellement pour redoubler d’attention et vous assurer ainsi de sa satisfaction. « Et si ce n’est pas le cas à certains moments, il sera toujours temps d’ajuster le tir en temps voulu ! »
4. Sortir de sa zone de confort (intelligemment)
Il n’est pas toujours évident de sauter le pas quand il est question de feedback. « Aussi, pour vous faciliter la tâche, n’hésitez pas à commencer par vous tourner vers des clients avec qui la collaboration s’est bien déroulée », suggère Yéza Lucas. Rien de tel que se faire caresser dans le sens du poil pour gagner confiance en soi.
Et une fois que l’exercice vous sera familier, peut-être vous sentirez-vous capable de vous confronter à des avis plus nuancés ? « Rappelons qu’il faut avant tout percevoir ce dernier comme un challenge, un entraînement capable de vous faire progresser et non un moyen de vous condamner », poursuit la spécialiste.
5. Intégrer le retour dans son process
Au vu des avantages que présentent les retours, il va être important que cette étape fasse partie intégrante de votre quotidien au même titre que l’administratif. « Alors pour automatiser cette demande, pensez à l’intégrer dans la boucle des différentes étapes à accomplir lors de la mission », conseille Yéza Lucas.
En formulant la demande au moment d’envoyer votre facture par exemple, ou en intégrant le lien de votre profil Linkedin à la toute fin de la mission… « Trouvez le moment le plus opportun à vos yeux et répétez-le de manière à en faire un réflexe indissociable de votre pratique ! » Promis, vous vous habituerez.
6. Clarifier sa demande
Si vous avez des doutes sur certains aspects de votre prestation après réflexion, ou que vous cherchez à connaître précisément l’avis du client sur une compétence en particulier, n’hésitez pas à formuler clairement votre demande. « Cela vous fera gagner du temps à tous les deux et vous permettra de pouvoir travailler sur ces aptitudes en question par la suite si nécessaire », énonce la coach.
Évidemment, il ne s’agit pas de forcer le client mais simplement de le guider dans sa démarche, surtout si votre prestation lui a plu et que votre collaboration s’est bien déroulée.
7. Ne pas se disperser
De la même manière, si vous avez vocation à rendre les feedbacks publics, pas la peine de tourner autour du pot pendant dix ans : formulez-le clairement lors de votre demande. Pour cela, précisez le format auquel vous pensez, et la plateforme sur laquelle vous souhaitez le voir apparaître.
« Pensez également à centraliser vos avis sur une ou deux plateformes maximum plutôt que de vous éparpiller », ajoute Yéza Lucas. Il est préférable de privilégier les plateformes officielles à savoir Google et Linkedin. « Non seulement ces plateformes offrent le plus de visibilité, mais elles permettent aussi de gagner en légitimité », confirme l’experte.
8. Rejoindre un collectif
Voilà plusieurs années que les collectifs de freelance émergent dans le monde du travail. « Et pour cause, ces derniers rassemblent les freelances, favorisent leurs échanges, les stimulent et leur donnent les moyens d’avancer », observe Leila Haddouche. Alors plutôt que de rester dans votre coin, n’attendez pas uniquement les feedbacks de vos clients, provoquez aussi ceux de vos pairs !
En plus de la bonne ambiance quasi assurée, vous serez challengé sur votre activité au quotidien et pourrez progresser avant même qu’un client vous le fasse remarquer. « D'ailleurs, il n’est pas obligatoire de réunir des personnes du même secteur, précise la co-créatrice de Lookoom, pensez simplement à vous entourer de personnes inspirantes qui apporteront un regard nouveau sur votre travail » Alors, n’hésitez pas à rejoindre un collectif ou à en monter un vous-même sur Collective !
Finalement, le freelance a tout à gagner en cherchant à obtenir des feedback de la part de son client, tant pour progresser dans sa profession que pour développer son activité. « Et si le manque de clients vous fait défaut en raison de la nouveauté de votre statut, n’oubliez pas que vous pouvez également faire appel à d’anciens collaborateurs pour vanter vos qualités humaines » rappelle Yéza Lucas.
Car peu importe son niveau d’avancement dans le freelancing, tout le monde est à même de recevoir un avis sur son travail. Alors pourquoi pas vous ?
Article édité par Paulina Jonquères d'Oriola