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5 mai 2022

8 min

À propos

De journaliste à Content Manager en startup, il n’y a qu’un pas… que j’ai franchi

Après avoir évolué pendant plus de 10 ans au sein de la presse traditionnelle, Paulina nous a récemment rejoints en tant que Lead Content Manager pour relever le défi des ambitions média de Collective.

Mais pourquoi avoir choisi de quitter les salles de rédaction pour les bancs d’une startup ? Quels sont les atouts et les limites de cet exercice ? Et qu’est-ce que cela signifie en termes de mutation dans l’univers du contenu, et par-delà, de la presse ? Notre salariée nous livre ici son parcours et sa vision.

Paulina et Jean, CEO de Collective

Ce matin, je démarre ma journée face à mon MacBook Air flambant neuf, mes cartes Swile et Alan en poche. Le cliché de la salariée en start-up. Pourtant, il y a encore quelques temps, j’étais plutôt l’archétype de la pigiste - comprenez la journaliste freelance qui cumule les collaborations avec différents titres de presse.

Un statut que j’ai rapidement embrassé après avoir démarré ma carrière chez Aufeminin.com, le pupreplayer n°1 de l’époque (back in 2010 les amis). En 2013, j’ai décidé avec mon conjoint de quitter la capitale qui ne m’avait guère emballée, pour m’installer à Lyon. A l’époque, le freelancing s’est imposé naturellement car il n’existait que peu d’opportunités professionnelles pour une salariée en province, et le télétravail avec une rédaction parisienne relevait encore de la science-fiction. Et puis, j’avais constaté que les papiers les plus fournis étaient souvent confiés aux pigistes. Or, ce qui m’attirait le plus, c’était le travail de reportage et d’écriture.

Plutôt branchée presse magazine, j’ai réussi à me faire une petite place dans ce monde impitoyable de la pige en décrochant des collaborations pour des titres comme L’Express, Le Figaro, Grazia, Business O Féminin, Doctissimo, Sciences Humaines… Et j’en passe ! Une multiplicité de tons, formats et sujets qui m’ont réellement comblée pendant de longues années.

Quand l’équilibre familial bouscule l’équilibre pro 

Et puis ce fut l’arrivée tonitruante de mes kids, avec son lot d’inquiétudes et de combats à mener. Mon activité de freelance était alors une affaire qui roulait et me donnait suffisamment de latitude pour gérer mes obligations de jeune maman. 

A cela, une nouvelle donne s’est ajoutée : mon mari, qui était le pilier financier du foyer, s’est lancé à son tour en créant son entreprise. D’un coup, je me suis retrouvée à devoir justifier le salaire principal du couple, notamment pour rassurer le banquier lors de l’obtention de notre crédit immobilier.

Logiquement, ces facteurs m’ont poussée à booster au maximum ma productivité (je vous recommande à cet égard la lecture de notre interview de Laetitia Vitaud sur le sujet qui explique pourquoi les indépendants sont particulièrement soumis au culte de la performance). Bon, pour être 100% transparente, je n’étais clairement pas à plaindre car j’ai toujours conservé beaucoup de temps pour mes loisirs. Mais au prix d’une efficacité poussée à son paroxysme, ce qui est particulièrement éreintant avec le travail d’écriture.

Je multipliais alors les projets alimentaires pour augmenter mes revenus : j’étais devenue la championne du brand content “vite fait bien fait”, pour m’offrir le “plaisir” de quelques piges plus élaborées. Il faut savoir qu’au vu du temps consacré pour ce genre de sujet en presse, même dans un titre national, on ne peut décemment vivre de cette activité, surtout lorsque les charges du foyer augmentent à vue de nez. 

J’avais alors l’impression de travailler en mode abattage, de quoi me rappeler les avertissements de mes profs à Sciences Po Toulouse qui tentaient presque tous de nous détourner des médias. A titre d’exemple, l’un des journaux pour lesquels je travaillais depuis 8 ans n’a jamais augmenté le tarif des piges, mais nous a plutôt demandés (les pigistes) des services supplémentaires. Un tableau sombre que l’on retrouve dans toute la presse et qui s’assombrit à mesure que les industriels rachètent les titres traditionnels. 

Premiers pas dans le monde des startups…

C’est ainsi que par volonté de me sécuriser, mais peut-être surtout par goût du challenge, j’ai décidé de rejoindre un univers que je ne connaissais pas : celui des startups. Welcome to the Jungle fut ma porte d’entrée. Le sésame parfait pour effectuer ce glissement, puisque la rédaction est principalement composée de journalistes qui exercent en toute indépendance. Un CDD de 6 mois en remplacement de congé maternité qui m’a permis de refaire un saut dans le salariat, sans trop me pressuriser, moi qui avais peur de ne plus être adaptée au monde de l’entreprise.

J’y ai alors découvert le travail à distance. J’ai aussi vu dans cette opportunité l’occasion de me familiariser avec le béaba des logiciels et outils collaboratifs comme Notion, Monday, Slack… quand je me contentais de ma suite office pour mes activités de pigistes (je n’avais d’ailleurs même pas touché à un bon vieux Power Point). J’ai aussi dû me familiariser avec les fameuses “préz”, moi qui oeuvrais en loup solitaire. Une sorte de reset à l’aube de mes 35 ans. Essentiel si je voulais prétendre prendre des postes à responsabilités. Car là résidait certainement LA grande question : quelles étaient mes ambitions pour la seconde partie de ma carrière ?

Après WTTJ, j’ai continué quelques mois en piges, et ai découvert une myriade d’opportunités en vendant mes articles à des startups ou scaleups. J’ai alors pu pousser mon expertise sur le futur du travail, les sujets liés aux évolutions RH etc.

Pour la première fois de ma vie, le rapport de force s’inversait : je pouvais enfin fixer mes prix et consacrer le temps qu’il fallait pour peaufiner mes sujets et peu à peu délaisser mes collaborations alimentaires. J’ai ainsi donné un nouveau souffle à ma carrière de freelance, mais j’avais le sentiment qu’il me manquait un élément de l’équation de l’épanouissement professionnel.

Pour vous donner une idée des tarifs : alors que je pouvais gagner 180 euros nets pour un papier dans la presse traditionnelle qui m'avait pris deux jours de travail, je facturais jusqu'à 700 euros des papiers me demandant 1 jour et demi de travail (j'estimais mon TJM à 500€/jour). C'est d'ailleurs pour cela que j'ai choisi de rémunérer les pigistes de Collective entre 300 et 700 euros le papier selon la complexité du sujet.

Collective, un choix naturel

Je crois qu’en refaisant un saut dans le monde de l’entreprise, mon esprit de compétition (comprenez de compétition envers moi-même) s’est ravivé. Du moins, l’envie de mesurer mon impact sur un projet de A à Z, ce qui est plus compliqué lorsque l’on bosse en freelance solo. Le modèle du collectif de freelances, que je ne connaissais pas, aurait pu apporter une réponse à cette frustration, et me prodiguer la tribu dont j’avais besoin. Mais je l’ai découvert… en postulant pour Collective, et pour le meilleur !

Car pour faire le grand saut dans le salariat - le CDI - il me fallait trouver LA bonne opportunité. La boîte qui me permettrait d’avoir un terrain de jeu assez étendu pour ne pas tourner en rond éditorialement parlant. Certains journalistes se demanderont pourquoi je n’ai pas pensé à rejoindre à nouveau un média ? Et bien car encore aujourd’hui, la presse n’est pas très “remote friendly”.  Et ne parlons pas des salaires peu folichons, clairement pas à la hauteur de ce que je pouvais gagner en piges, surtout grâce à mes nouvelles collaborations.

Il fallait aussi que je trouve une entreprise qui serait ouverte aux nouvelles modalités de travail, autrement dit, prête à m’offrir un 4/5ème et me laisser le loisir de conserver du temps personnel (à dédier à mes enfants, mes loisirs ou mes activités de freelance auxquelles je tiens malgré tout).

Cette entreprise, ce fut Collective. J’ai d’abord été embarquée par la vision très claire de Jean, notre CEO : je partage tout à fait l’idée selon laquelle les collectifs vont jouer une partition importante à l’avenir dans les organisations. La trajectoire de la boîte m'a également impressionnée (Collective a levé 7 millions d'euros en seed en seulement quelques mois d'existence).

Collective, c’est donc l’alliance parfaite de la "sécurité" et de l'indépendance, que je recherchais moi-même. Sécurité conférée par la force du groupe, le professionnalisme de la squad, le cadre de l'entreprise-as-a-service... couplée à la liberté du travail indépendant, où l'on choisit ses missions, ses coéquipiers, son nom de collectif, voire de ses collectifs, puisque le modèle est totalement hybride.

Le modèle est encore peu connu, et un vrai travail de recherche doit être mené sur le sujet. Un défi que nous voulons relever.  Plus généralement, l’ambition de Collective est telle qu’elle m’ouvre de très grandes portes en matière de contenus.

Bien sûr, il faudra y aller graduellement : on ne peut pas s’inventer média du jour au lendemain. Et j’ai tant à apprendre de mes collègues du business, growth, tech… Cela suppose un coût d’apprentissage élevé au démarrage quand on n’a absolument pas évolué dans ces univers et que l’on se retrouve à être la seule journaliste de sa boîte. 

Mais les relations sont peut-être encore plus riches si tant est que l’on est capable de communiquer et de ne surtout pas travailler en silo, même quand ses collègues parlent parfois un autre langage. En réalité, il s’agit d’une opportunité unique de saisir au coeur les sujets qui feront l’entreprise de demain, à la fois en termes de gouvernance et d'opportunités business.

Des adieux à jamais ?

Si je suis convaincue - en tout cas je le souhaite farouchement -  que les médias d’information ne disparaîtront pas en ce qu’ils sont essentiels à la démocratie, je suis plus sceptique quant à une grande frange de la presse qui méprise chaque jour un peu plus ses journalistes en les sous-payant et les précarisant, quand les employés côté régie affichent des grilles de salaires bien plus élevées (CQFD).

Pour ma part, mon choix est fait : ironiquement, je me sens davantage respectée dans un univers qui m’est totalement étranger. Il va me falloir combler certaines lacunes, mais en recherchant la complémentarité des profils, il est possible de créer des synergies tout à fait étonnantes et innovantes. 

Au quotidien, je conserve désormais le journalisme “classique” comme une activité “bonus” sur mes temps de repos. Peut-être y reviendrais-je plus tard, à la faveur de nouveaux équilibres familiaux. Dans l’intervalle, un nouveau défi s’offre à moi !

Paulina Jonquères d'Oriola

Membre du collectif PROZ - Journaliste Sénior

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